1er décembre 2018
Je m’appelle P., ma femme s’appelle V. Nous avons 26 ans.
Une vie difficile là-bas nous a fait partir ailleurs. Où ? On ne savait pas où. Mais maintenant, on sait où nous sommes. Cela fait deux ans et deux mois qu’on est en France, à Brest.
Au début, nous nous sommes retrouvés dans les couloirs d’un immeuble où il y avait beaucoup de demandeurs d’asile. Pendant 3 mois, nous y avons dormi et mangé. Nous avons eu peur quelques fois et nous nous sommes amusés quelques fois.
Sur ordre de je ne sais pas qui, on nous a fait quitter ces couloirs pour dormir dans des hôtels, pendant une semaine. A cette époque-là, j’ai acheté une voiture parce que je savais qu’allait venir le moment où on se retrouverait dehors. Comme ça, j’ai pensé “je vais dormir dans la voiture”. Et voilà, ce temps est venu et nous avons dormi dans la voiture pendant 4 mois ou plus. Quelques fois, on trouvait un logement pour une ou deux nuits, après on se trouvait encore dans la voiture. C’est comme ça qu’on a appris toutes les routes de Brest !
La vie est belle dans la voiture, avec des nuits tristes et des matins avec beaucoup d’espoir. Des jours encore plus beaux que les jours passés survenaient quand on était logé chez les familles françaises. Il faut que vous sachiez que chaque jour dur ici est meilleur que les jours très durs et douloureux qu’on a passés dans notre pays.
Nous avons été logés par plusieurs familles. Les dernières, où nous sommes restés le plus longtemps, ce sont les familles G. et P. C’est avec eux qu’on a appris à parler français, qu’on a goûté beaucoup de plats français et aussi que nous leur avons fait goûter les plats de notre pays. En mangeant, nous avons beaucoup parlé. Au début, c’était très difficile parce qu’on ne pouvait pas dire un seul mot sans être arrêtés, et qu’ils nous disent: “Ce n’est pas comme ça, il faut dire comme ça”. Grâce à ça, je fais moins de fautes.
Le temps a passé et le 4 décembre 2017, nous avons fait une demande à la préfecture. On est encore dans l’attente d’une réponse. “Il faut attendre” nous disent les gens qui travaillent à l’accueil de la préfecture. Mais pendant cette attente, nous il nous faut dormir, il faut qu’on mange, il faut être hébergés quelque part.
Pour tout ça, je remercie Dieu et les familles qui nous ont hébergés jusqu’à maintenant et qui continuent à nous loger. Mais comme ça fait un an et demi qu’on est chez ces deux familles, deux semaines chez l’une et deux semaines chez l’autre, on pense qu’il faut trouver une autre solution. On avait pensé aller à Emmaüs comme compagnons, mais après beaucoup de discussions avec les deux familles, nous sommes arrivés à la conclusion que c’est mieux d’essayer un 100 pour 1 toit.
C’est ça, en gros, ce qui s’est passé et on ne sait jamais ce qui va se passer demain. Au nom de ma femme et de moi-même et, de tous les gens qui ont besoin d’aide, je vous remercie pour votre courage, votre volonté, votre temps et l’argent que vous donnez pour nous”.