Suite à l’Assemblée générale de Digemer, le 8 octobre 2020, le journal “Le Télégramme” consacre une page entière à Digemer dans son édition de Brest du 15 octobre (dans les pages Brest). A lire !

Si vous n’avez pas accès à ce journal, voici, ci-dessous, les 4 articles de la page.

Régularisation : « La France, le pays où j’ai des droits »

Géorgienne d’origine arménienne, Seda Muradova a son titre de séjour depuis le printemps. Elle raconte comment sa vie, à Brest, en a positivement été bouleversée.

Le Télégramme – Brest, 15 Oct 2020 – David Cormier

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Seda Muradova est heureuse d’avoir été régularisée sur le territoire français au printemps dernier.

 « Ma vie a complètement changé ! Elle est plus stable. J’ai le droit de travailler, j’ai un appartement, je peux améliorer la vie de mes enfants, un garçon de 11 ans et une fille de 3 ans… Je n’ai plus peur d’être expulsée vers mon pays, comme avant : je voyais la police arriver, dans mon sommeil ». Regard doux derrière ses lunettes en écaille, voix calme, Seda Muradova, 35 ans, est pourtant un petit bout de femme dynamique.

Arrivée en 2009

Régularisée au printemps dernier, cela faisait plus de dix ans qu’elle était en France. « Nous avons quitté la Géorgie en juillet 2009 pour la Pologne, avec mon ex-mari et mon fils qui était bébé ». La Géorgie où son ex-époux avait des ennuis assez sérieux pour les amener à fuir, « alors qu’on y vivait bien », malgré une discrimination courante de la part du régime à l’égard des Arméniens d’origine. Une Arménie que leurs familles avaient fuie au moment du génocide, il y a un siècle. Lui avait toutefois « pu obtenir un appartement grâce à son grandpère ancien combattant médaillé de la Seconde Guerre mondiale ».

« En Pologne, notre demande d’asile a été tout de suite refusée et il a fallu partir rapidement. Nous sommes venus en France, à Saint-Étienne, en novembre », détaille encore la jeune femme. Les demandes ont, là aussi, échoué. Une obligation de quitter le territoire français a été prononcée à Lyon mais l’expulsion n’a pas eu lieu dans l’année qui a suivi. Elle n’a pas été appliquée. La famille est venue à Brest, en octobre 2014, où elle avait une connaissance familiale.

Des semaines à « dormir dans la voiture »

Les premières semaines, « on a dormi dans la voiture, puis un couple de Crozon, Thierry et Christine, nous hébergeait », se rappelle Seda, infiniment reconnaissante. « Nous l’avons connue par l’association Cimade (Comité inter-mouvements auprès des évacués) », confirme Christine Fenoy, qui a gardé le contact. « Elle est très courageuse ! ».

En 2015, Coallia (*) les a installés dans une petite chambre au port de commerce. À la naissance de la petite fille, il y a trois ans, ils s’y entassaient donc à quatre. Puis il a fallu la libérer et l’association « 100 pour un toit », issue de Digemer, leur a payé le loyer d’un appartement. Le temps que l’Aide personnalisée au logement et, désormais, le salaire de caissière de Seda, y subviennent. « Ces onze ans d’attente, cela a été très difficile, psychologiquement », convient-elle. « La première année, je ne comprenais rien. On n’avait pas d’argent, je voulais rentrer chez nous mais c’était trop dangereux ». Puis elle a appris le français, petit à petit : « Je ne connaissais que des chansons d’Aznavour… » Elle le parle bien aujourd’hui, bien qu’elle veuille progresser, surtout à l’écrit, pour reprendre ses études, envisageant un master pour travailler dans l’administration. En plus du géorgien et de l’arménien, elle parle russe, depuis ses années d’école à Moscou, quand ses parents s’y étaient provisoirement installés pour trouver du travail. Jusqu’à la chute de l’URSS.

Quoi qu’il en soit, la France, pour elle, aujourd’hui, « c’est très joli et si on travaille, on a une bonne vie ! Et c’est le pays où j’ai des droits, les droits de l’Homme… ».

  • Coallia est un centre d’hébergement et de réinsertion sociale

Sur le telegramme.fr, son témoignage en vidéo
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Digemer aide 220 migrants ou demandeurs d’asile

Le Télégramme – Brest – 15 Oct 2020

Diverses associations, à Brest et ailleurs, viennent en aide aux migrants et demandeurs d’asile, se répartissant plus ou moins les profils. « Nous ne nous occupons que très peu des mineurs isolés », explique ainsi Jean Le Velly, président de Digemer, fondée en 2014.

Digemer (« Hospitalité », en breton) annonçait, lors de son assemblée générale, jeudi soir au centre social Horizons, à Pontanézen, héberger « 53 familles et 22 personnes seules, soit 220 personnes en grande difficulté, sans accès au logement, sans ressources », parfois depuis dix ans. Et le chiffre augmente régulièrement.

Un « durcissement de la politique » dans le Finistère

Aujourd’hui, sont affiliés à Digemer 31 collectifs « 100 pour un toit » (100 donateurs offrent 5 € par mois – ou plus – pour payer le logement d’une famille) constitués à Brest et dans le Nord-Finistère. Le mouvement s’accélère. Plus de 200 bénévoles et plus de 1 000 donateurs contribuent à l’accueil, l’accompagnement au quotidien (démarches administratives, assistance juridique, aide alimentaire, santé, déplacements, vie sociale, activités diverses, apprentissage de la langue, etc.). Certains bénévoles accueillent des personnes chez eux, un temps, puis d’autres. Divers partenaires (La Croix-Rouge, Emmaüs, le Secours populaire, le Secours catholique, la Ligue des Droits de l’Homme…) apportent aussi leur soutien, de même que des collectivités.

« Les personnes qui font appel à nous sont surtout des Albanais, ou bien des Serbes… Des Pakistanais un peu, de jeunes adultes africains parfois, plus souvent des Arméniens, des Géorgiens », détaille Jean Le Velly. « Les gens issus du Maghreb, par exemple, ne s’adressent pas à nous et se tournent beaucoup plus vers leur communauté ». « C’est l’humain qui est primordial, plus que l’administratif », ajoute une bénévole, Annie Le Moigne. « On va les voir chez eux, souvent, on les aide, on se lie d’amitié ».

Digemer déplore, avec d’autres, le durcissement de la politique à l’égard des demandeurs d’asile, dans le département mais espère que le nouveau préfet sera plus conciliant que le précédent…

Pratique
Digemer, 30 rue du Docteur Charcot à Brest. Courrier : digemer.asso@gmail.com
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« En Albanie, on a vécu des choses terribles »

Le Télégramme – Brest, 15 Oct 2020

 « On est venus à Brest pour aller le plus loin possible ! Ici, c’est le bout ! » du continent, effectivement. Fuir l’Albanie, cette région de Shköder d’où sont issus nombre d’Albanais de Brest, même si Drita Shabani, 47 ans, n’en connaissait pas avant de venir. Fuir en voiture avec son mari et leurs trois enfants, mimai 2012, parce qu’au pays, « on a vécu des choses terribles ! » Des violences, pour des raisons politiques, dit-elle. La famille se plaît dans son nouvel environnement. Les enfants y font leur vie : l’aîné (24 ans) est pacsé à une Française, la première fille (21 ans) est mariée (et régularisée) tandis que la seconde, 17 ans, est au lycée de l’Harteloire. Le mari de Drita a eu un titre de séjour pour trois ans pour raisons médicales. Il a travaillé dans des serres, il est bénévole au Secours populaire. Le couple est toujours là, mais en demande de papiers. Tout comme le fils qui s’est vu opposer un refus mais a posé un recours.

« Ce que j’aime bien à Brest, ce sont surtout les gens et la propreté de la ville », reprend Drita, qui oeuvre parfois en tant que traductrice pour l’association Digemer. Elle entend « juste avoir une vie normale ».
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« Depuis 2015, c’est plus dur pour les étrangers d’avoir des papiers »

Le Télégramme – Brest 15 Oct 2020

Bénévole déjà juste avant la création de Digemer, il y a sept ans, Annie Le Moigne (en photo), 79 ans, avait déjà une expérience de 26 ans au Secours catholique. « Rien qu’en sept ans, j’ai vu l’évolution », témoigne-t-elle.

« En 2013-2014, c’était plus facile de faire naturaliser les gens. Mais depuis 2015, c’est plus dur d’avoir des papiers et le précédent préfet refusait presque sans distinction aucune. Cela semble aller mieux », espère-t-elle. Elle continue à aider des gens comme Drita Shabani et d’autres avec des sorties communes, aider à apprendre le français, la couture, l’art floral…